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3 juillet 2014

Gondry dans le monde

Pour ceux qui auraient râté cette interview de Gondry dans le monde.

 

 

« J'ai appris avec déception l'abandon du projet de l'Usine de films amateurs par la ville d'Aubervilliers. La nouvelle équipe n'a pas souhaité poursuivre l'investissement nécessaire, alors qu'au bout de trois ans de travail, le projet se concrétisait. » Le réalisateur français Michel Gondry a réagi publiquement, ce mardi 1er juillet, par communiqué, au vote du conseil municipal qui avait mis un terme au projet, jeudi soir, à la surprise générale.

Pour rappel, ce projet initié en 2011 avait été officiellement lancé à la mi-janvier par l'ancienne municipalité socialiste en présence du cinéaste, lors d'une conférence de presse organisée dans l'ancienne manufacture d'allumettes de la ville. Il prévoyait d'installer à l'horizon 2016, après la réhabilitation des 1 000 m2 du site, un vrai plateau de cinéma ouvert à tous, notamment aux jeunes de la ville et aux scolaires. Selon un protocole inventé par le cinéaste de Soyez sympas, rembobinez (Be Kind Rewind, 2007) et déjà expérimenté de façon temporaire à New York, Rio, Paris ou Casablanca, cette « usine de films amateurs » pérennisée devait permettre de créer en groupe une histoire et la tourner en trois heures dans des décors de toutes natures récupérés sur des tournages.

 

« UN EFFET D'ANNONCE »

Jeudi soir, le conseil municipal a stoppé net le scénario envisagé, où la fiction avait pris le pas sur la réalité, avance-t-on du côté de la mairie. « Il y a eu un gros effet d'annonce en janvier, mais absolument rien de concret n'a jusqu'ici été mis sur la table », affirme-t-on au cabinet du maire. A cette époque, le coût des travaux avait été estimé à hauteur de 1,5 million d'euros, et la mairie s'était engagée à participer à hauteur de 500 000 euros. Depuis, les élections municipales ont rebattu les cartes, et le maire PS d'alors, Jacques Salvator, a dû laisser son fauteuil à un élu communiste, Pascal Beaudet.

La question a été tranchée lors du vote du budget supplémentaire pour 2014 : « La ville est engagée dans une politique de réduction des coûts, nous ne sommes pas en mesure d'engager de tels financements. D'autres financements sont plus importants pour la commune. L'idée était superbe, mais ce n'est pas faisable, pas viable, et le maire a simplement pris ses responsabilités », explique-t-on à la mairie.

Jacques Salvator, aujourd'hui dans l'opposition, s'est battu lors des délibérations pour que le mot d'« abandon » soit remplacé par une « suspension » du projet qu'il avait porté, une demande refusée par le maire. L'ancien édile ne mâche pas ses mots : « C'est d'une stupidité incroyable, ce projet se base sur une mise à disposition de locaux rénovés, or la ville est obligée de rénover les lieux. »

« UNE FAUTE VIS À VIS DE L'HISTOIRE DE LA VILLE »

A moins que la municipalité souhaite se débarrasser du bâtiment. Pour Jacques Salvator, revendre l'ancienne manufacture serait « ridicule ». La municipalité avait acquis l'immense site en 2011 pour quelque 8 millions d'euros. Elle avait alors besoin de foncier pour créer une nouvelle école élémentaire, a gardé une partie des locaux, puis revendu le reste à un promoteur de locaux d'entreprises, Sirius, pour 8 millions d'euros. Une opération blanche qui lui a donc offert au passage cet immense espace dans une zone industrielle en renouveau. Sirius, de son côté, aura pu trouver dans le projet Gondry un argument pour amener sur place des entreprises du secteur de l'image et de l'art.

« Au-delà du gâchis », l'abandon du projet de Gondry constitue en tout cas « une faute vis à vis de l'histoire de la ville », selon l'ancien maire. « Nous avons la possibilité de mettre ce lieu magnifique, qui fait partie de l'histoire ouvrière de la ville, à la disposition d'un artiste de renommée internationale pendant quelques années. » Car même pérennisé, ce projet n'en est pas pour autant « éternel », selon lui : « Au bout de quelques années, Michel Gondry serait sûrement passé à autre chose, mais le lieu rénové peut servir à d'autres projets après. »

« VITALITÉ ARTISTIQUE »

Anaïs Bouhloul, ancienne membre du cabinet de Jacques Salvator, et qui est à l'origine du projet d'implantation dans la manufacture, est sur la même ligne. « Ce projet s'inscrit dans la continuité de la politique culturelle d'Aubervilliers », soutient la jeune femme, qui a grandi dans la ville, en faisant référence à l'ancien maire communiste emblématique, Jack Ralite.

« Il ne s'agit pas d'amener de grandes œuvres aux masses populaires, mais de révéler la vitalité artistique de nos quartiers », indique celle qui avait rencontré Michel Gondry au début 2011 lorsque son Usine de films amateurs s'était temporairement installée à Beaubourg. « Il y a toujours eu une vraie ambition autour de la culture ici, et ce projet est une évidence face au vivier de réalisateurs, de producteurs ou de comédiens de la ville. »

 

Aujourd'hui, la municipalité avance le chiffre de 2,7 millions pour permettre à l'Usine de films de voir le jour, « hors budget de fonctionnement ». Un chiffre remis en cause par Anaïs Bouhloul : « L'étude de programmation financée par le conseil régional du tourisme proposait deux options, l'une à 2 millions avec une salle de projection et un aménagement des espaces extérieurs, une autre à 1,5 million. Je ne sais pas sur quoi se base ce nouveau chiffre. »

Quant au budget de fonctionnement, il est censé incomber à l'équipe du cinéaste, à qui la ville doit simplement mettre les locaux à disposition. « L'Usine doit fonctionner avec un directeur, un administrateur et une personne chargée du public, et embaucher des étudiants en cinéma pour guider les tournages, comme c'était le cas à Beaubourg », précise Anaïs Bouhloul.

Safia Lebdi, élue Europe Ecologie-Les Verts à la région, affirme pour sa part que « c'est un des projets de réhabilitation les moins coûteux en Ile-de-France. Et il y a plein de moyens de financement, divers fonds, c'est seulement une question de volonté politique. » L'élue en charge de la commission culture en Ile-de-France rappelle qu'une « convention de mécénat a été signée à la mi-janvier pour la restauration, avec le département et la région, et des acteurs privés : la fondation du patrimoine et la Fondation du Crédit coopératif ». Et de réaffirmer : « Ce projet est un projet en or. Gondry offre un outil de travail sur l'image extraordinaire, avec une vraie dimension éducative, et un lieu de rencontre populaire. Aubervilliers est une ville en devenir dans le Grand Paris. »

UN AUTRE LIEU DANS LE 93 ?

Malgré le vote d'« abandon », aucun des porteurs du projet ne l'évoque au passé. « Je ne perds pas espoir. L'abandon a été voté, mais rien n'empêche de représenter une délibération », affirme Anaïs Bouhloul. « J'en parle au présent car ils vont être obligés de reculer », déclare pour sa part Jacques Salvator. Le maire, Pascal Beaudet, doit rencontrer Michel Gondry « à la mi-juillet ».

Le cinéaste, qui prépare actuellement le tournage de son prochain film cet été, prévoit d'ores et déjà de poursuivre l'aventure itinérante de son Usine de films à Tokyo et Lille. Quant au projet pérenne, il n'y renonce pas : « Nous poursuivrons nos efforts, dans la mesure du possible, afin que l'usine voie le jour à Aubervilliers, mais nous serons également très heureux d'être accueillis dans une autre commune qui pourrait être intéressée », précise-t-il dans son communiqué.

 

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